N°1 - OCTOBRE 2002 L'apostasie immanentepar Jean MADIRAN
• C’est Jacques Maritain, dans un éclair de grande lucidité, qui dès 1965 a marqué au fer rouge l’évolution conciliaire à son début en lui donnant le nom définitif d’"apostasie immanente".
• L’"apostasie" est le fait d’un chrétien qui rejette la foi chrétienne. Elle est « immanente » quand, contradictoirement et malgré tout, elle est « décidée à rester chrétienne à tout prix », explique Maritain. Disons plutôt, dans le même sens mais un peu différemment quand elle prétend garder la dénomination chrétienne.
• Exemple : le dénommé « enseignement catholique » qui déclare officiellement que «l’école catholique n’est plus confessionnelle » et qu’elle « n’est pas l’enseignement de la religion chrétienne », mais prétend garder la dénomination de seule « école catholique » d’appellation contrôlée (Présent du 12 octobre).
Autre exemple, aussi dramatiquement probant : la Bible Bayard, dont l’"appareil critique" assure que les paroles de Jésus dans les Evangiles ont toutes été inventées. Et la « Commission doctrinale des évêques de France » a décrété que c’est justement cet « appareil critique » qui permet d’inscrire cette Bible « dans la tradition vivante de la foi catholique ». Aucune intervention du Magistère n’a jusqu’ici inversé ou freiné cette évolution conciliaire de la
scolarité et de l’exégèse.• L’apostasie immanente de l’évolution conciliaire s’est entièrement démasquée dans La Croix du 3octobre (Présent du 4), en présentant comme un fruit de Vatican II le rejet du traditionnel acte de foi, dont le texte était entièrement cité afin que l’on sache bien qu’après vingt siècles de christianisme, à partir du vingt et unième il ne faudra plus ni dire ni faire
ni penser : « Mon Dieu, je crois fennement toutes les vérités que Vous avez révélées et que Vous nous
enseignez par Votre Eglise parce que Vous ne pouvez ni Vous tromper ni nous tromper. »Ce n’était pas un passager mouvement de (mauvaise) humeur de La Croix, mais l’énoncé d’une décision mûrement délibérée, explicitement argumentée, épiscopalement garantie en des termes définitifs.
La « formulation de l’acte de foi » jusqu’à Vatican II commettait donc l’erreur d’être « centrée sur les vérités à croire et l’autorité révélante de Dieu ». C’est fini. On a changé tout cela. « Comment Dieu parle-t-il ? Non par des vérités à croire en toute soumission à l’autorité. »Ce qui est ainsi rejeté, c’est bien l’objet de la foi.
Son « objet formel » : pourquoi je crois, parce que c’est Dieu qui révèle.
Son « objet matériel » : ce que je crois, ce sont les articles du Credo.- La foi n’est pas quelque chose qui se « transmet », enseignent aujourd’hui l’évolution conciliaire et son apostasie immanente.
Ainsi la foi ne serait plus un don de Dieu, une disposition surnaturelle infuse, reçue au baptême, ayant ensuite besoin d’être éduquée par une instruction religieuse (ex auditu) et l’apprentissage d’une vie chrétienne. Dès lors il n’y a plus d’éducation catholique ; ou en tout cas celle-ci ne consiste plus qu’à amener « sur le seuil » d’un « choix adulte et responsable » entre les diverses religions et philosophies considérées comme étant toutes des opinions également respectables. Bien sûr, cela est tout à fait contraire aux « apports positifs du Magistère ». Mais en substance c’est bien cela qui submerge les diocèses, les paroisses, les écoles et le grand quotidien catholique La Croix.
Ce n’est pas moins souvent qu’avant-hier, c’est plus souvent que l’on entend des évêques dire comme celui d’Amiens : « Ne présentez pas l’Eglise comme détentrice de la vérité absolue », ou prêcher comme celui d’Evry « l’amour du monde tel qu’il est ». Elle ne baisse pas, elle monte, l’inondation des bulletins paroissiaux qui racontent : « La vérité d’hier n’est plus bonne, elle risque de corrompre la vérité d’aujourd'hui » ; « la vérité change tous les jours parce que la vérité est vivante ».
Nous ne vous disons pas ces choses pour vous décourager mais pour vous avertir ; pour que vous soyez mieux en garde, pour vos enfants et pour vous-mêmes ; pour que vous n’alliez pas vous perdre sans méfiance dans la nuit de l’apostasie immanente, comme la chèvre de monsieur Seguin.
Jean MADIRANArticle paru dans PRESENT, du 18 octobre 2002, reproduit avec l'aimable autorisation de M. Alain SANDERS
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